Depuis quelques semaines la presse algérienne est le théâtre de déclarations sur le thème du racisme frappant l’immigration subsaharienne. La couverture du sujet n’échappe pas à des équivoques douteuses comme celle que rapporte El Watan (en ligne) sous le titre « Ghetto de Maghnia : la vie d’infra-humains des subsahariens ».
Certains, qualifiant de débat des positions pour le moins inqualifiables, crient à « la pollution », reprenant les propos de Ahmed Ouyahia secrétaire général du RND et directeur de cabinet du Chef de l’État ou ceux du ministre des Affaires Étrangères, Abdelkader Messahel. Le premier nommé voit dans l’immigration africaine, contre laquelle il faut sévir, une source de crimes, de drogue et de plusieurs fléaux. Le second qualifie la même immigration de « menace pour la sécurité nationale » facilitant la pénétration de terroristes. Relayant notoirement les services spéciaux américains et européens, le responsable de la diplomatie algérienne, miroir grossissant de la régression nationale, chiffre à 5000 les Africains au sein de groupes terroristes dans le monde.
L’état de l’Afrique aujourd’hui, trahie par les siens, livrée aux prédateurs de la finance internationale, à la merci des frappes occidentales, nous a incité à reprendre l’éditorial du numéro 1 de Révolution africaine du 2 février 1963. Pour ses premiers pas, l’hebdomadaire était dirigé par Jacques Vergès.
« POURQUOI NOUS PARAISSONS
L’Afrique notre patrie est sur le tiers de son étendue sous la domination étrangère spécialement dans les colonies portugaises, en Afrique centrale et du Sud.
« Révolution Africaine » fera connaître la lutte des peuples de ces territoires et appellera tous les hommes épris de liberté et de progrès à combattre à leurs côtés.
L’Afrique notre patrie est encore dépendante économiquement. « Révolution Africaine » fera connaître les expériences concrètes actuellement en cours pour la libération économique de nos pays et pour leur rendre les moyens d’accomplir leur destinée.
L’Afrique notre patrie recèle d’immenses ressources, et non seulement de matières premières comme le savent nos frères, travailleurs forcés d’Angola, mineurs du Transvaal, fellahs du Maghreb ou dockers des ports d’Afrique. Elle a un immense passé culturel qu’illustrent les Pyramides et les peintures des déserts, les masques d’Ifé, les bronzes du Benin, les ruines de Zimbabwe, les épopées zoulous, la philosophie d’Ibn Khaldoun et les cosmogonies bantous. Le colonialisme l’a systématiquement ignoré. « Révolution Africaine » révèlera ce passé et le fera revivre pour ses lecteurs.
Esclaves forcés, les Africains n’ont jamais eu l’âme servile. L’histoire de l’Afrique est aussi l’histoire de sa résistance à l’impérialisme. « Révolution Africaine » rendra leur vrai visage à Samory, El Hadj Omar, Rabah, à Mokrani, à la reine Jinga, précurseurs de Lumumba, Félix Moumié et Larbi Ben M’Hidi.
L’Afrique n’est pas fermée sur elle-même, elle est ouverte au monde depuis toujours, pas seulement vers la Grèce, Rome ou le Marché Commun, mais vers l’Europe orientale, l’Asie, l’Océanie et l’Amérique qui ne serait pas complètement l’Amérique sans les noirs. »Révolution Africaine » sera elle aussi ouverte à tous les souffles et à tous les problèmes du monde actuel… »